Z’avez pas lu Kafka (comme le chantait Suzanne Gabriello) ? Écrivain praguois s’il en est, son univers glauque toujours imité jamais égalé, sombre, sournois, tordu, flippant, où les héros et le lecteur semblent pris dans un dessin de M. C. Escher. La Métamorphose, Le Procès, Le Château autant de chefs-d’oeuvre à l’ambiance grisâtre et collante… Etaient-ce les rues de Prague – pourtant si colorées – qui lui inspiraient ce monde bureaucratique et cauchemardesque ?
Un autre auteur tchèque, émigré en France dans les années 1970, développera un monde bien à lui, plus empreint de poésie et de politique : Milan Kundera. J’ai beaucoup lu Kundera à une époque, dévorant coup sur coup L’Insoutenable Légèreté de l’Être, Le Livre du Rire et de l’Oubli, La Plaisanterie, Les Testaments Trahis… mais le livre qui me reste le plus en mémoire est La Vie est Ailleurs.
« Jaromil est poète et, à ce titre, ne souffre aucune atteinte au sérieux et à la dignité. Il est « le poète » ainsi désigné dès son plus jeune âge, et presque dès avant sa naissance, par sa mère. Il est Rimbaud. A vrai dire, sa vocation de poète n’a rien de spontané, fabriquée dès l’enfance par cette mère abusive et amère qui voit là l’instrument de sa revanche contre le monde. Et c’est en plein stalinisme que cette vocation trouvera à « s’épanouir ». »
Un texte magnifique sur l’adolescence, l’acceptation de soi, qui interroge l’homme et son rapport à l’art et à la politique. Une merveille !