Cala Comte / Dernière soirée / J’ai les clefs du paradis
Pour le dernier jour, une histoire de troglodyte nous a conduit à la plage de Cala Comte. Quand on y arrive, on tombe sur un parking plein. C’est peu engageant. Il faut s’approcher du bord.
Trop petite, trop isolée, trop à l’écart des grandes lignes de navigation et trop « en arrière » du siècle pour avoir contribué en rien au récent succès touristique des « îles Baléares » que Mallorca seule a provoqué, Ibiza, grâce à la discrétion de sa position géographique, a pu conserver intact son caractère pythiusien qui en fait une des îles les plus intéressantes de la Méditerranée.
Ceux qui ont fait, de Palma à Valence ou à Alicante, quelques heures ou quelques jours d’escale dans le port d’Ibiza croiront savoir de quel caractère je veux parler. Ils auront vu, dominée par une basilique — cette cathédrale que les chrétiens du XIIIe siècle ont commencé de bâtir sur l’emplacement d’un temple élevé à Mercure et que protégèrent contre les pirates, les formidables murailles construites par les Musulmans —, une ville toute blanche bâtie en gradins sur un rocher. Ils auront vu, près d’un marché où l’on vend des tortues de mer et des poissons volants, une église noire et des femmes se rendre à la messe dans leur costume de soie bleue, verte ou jaune — jupe plissée et long tombant donnant à la démarche la raideur et la grâce d’un mouvement d’accordéon —, les pieds chaussés de sandales en fibres d’aloès, les cheveux nattés et la poitrine bardée de douze chaînes d’or que surmonte un Christ couronné. Ils auront vu, dans le petit musée archéologique, des amphores d’argile phénicienne identiques à celles que l’on peut acheter pour quelques sous chez le potier et que les femmes, revenant des fontaines, portent avec une attitude que la hanche et les bras ont apprise il y a 25 siècles.
Pour le dernier jour, une histoire de troglodyte nous a conduit à la plage de Cala Comte. Quand on y arrive, on tombe sur un parking plein. C’est peu engageant. Il faut s’approcher du bord.
Sur les conseils d’une commerçante de Santa Euralia, nous décidons de partir découvrir les plages de Port Sant Miquel. On s’est levé tôt ce matin pour avoir une longue journée. Enfin tôt, 8h. Nous devons rejoindre le nord de l’île.
Le mercredi, il y a le marché hippie à Es Cana. C’est un incontournable. Toute l’île y vient. Nous ne pouvions le rater. Nous y sommes tous allés, même si c’est un marché pour les filles d’après Danielle.
A Ibiza chaque journée a sa plage. Et il y a une plage pour tous les jours de l’été. Nous avons mis le cap à l’ouest. Nous avons cheminé à travers la campagne, évitant la route principale, les trois scooters en file indienne. Le vent sur le visage donne un sentiment de liberté. L’air est chaud. La terre est rouge. La nature dégage de douces senteurs.
Le jour nous a réveillé un par un. Sur la terrasse c’est le premier café. Les visages sont doux comme les paroles. La vue sur la mer nous charme, le bruit des vagues nous berce, le parfum des lauriers roses ravit nos narines et la chaleur qui monte doucement câline notre épiderme. On se réveille doucement.
L’idée est venue au cours d’une soirée : « Et si on allait à Ibiza pour les vacances ? ».
Danielle et Fred y avaient acheté un appartement un an auparavant et leur récit amoureux de cette île avait suscité l’envie d’y aller.
Voyager chez soi
Dans les oreilles
Dans ma bibliothèque
Par une froide après-midi de février 1932, Walter Benjamin rencontre dans une rue de Berlin Félix Noeggerath, son ancien camarade de lycée. Ce dernier lui parle d’une île, au sud des Baléares, où il va partir avec sa femme et son fils, « faire l’exode ». Le climat y est doux, la vie très bon marché.
Île ouverte, la blanche Ibiza des années 30, accueille chercheurs de silence, de paix et de modernité. A bord du Catania, Benjamin s’y rend dès le mois d’avril, par le plus grand détour, le contour d’un continent entier, du port de Hambourg à celui de Barcelone, dernière escale avant l’éblouissement. Et bientôt des histoires jaillissent, des amitiés se nouent, des amours, des projets d’écriture : le récit d’un voyage raconté avec des histoires vraies, et celui d’une enfance. Il revient à Ibiza le printemps suivant, déjà sur le chemin de l’exil, y retrouve la foi en son étoile, son Ange nouveau.
Je ne sais pas pour vous mais moi ça me donne bien envie de les lire ces récits…
Sur les écrans
Stefan, étudiant allemand idéaliste part sur les routes d’Europe en stop pour vivre « l’instant présent » et fuir une société qu’il juge dépassée. A Paris, il rencontre Estelle, une jeune américaine dont il tombe fou amoureux et qu’il décide de suivre à Ibiza. Estelle accroc aux drogues va entrainer son compagnon sur la pente glissante des paradis artificiels. La quête ensoleillée de Stefan va se transformer en un gigantesque trou noir…
Ce premier film de Barbet Schroeder, défraiera la chronique lors de sa présentation (hors compétition) au Festival de Cannes en mai 1969. Mais c’est sa bande son, signée Pink Floyd, qui rendra culte ce chef-d’oeuvre intimiste, et témoin de l’ère hippie naissante.
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