Je n’ai réservé qu’une chambre mais Enrico, le maître des lieux semble les avoir désertés et je peux profiter de l’appartement entier… ce n’est pas pour ça que je vais rester enfermé : J’ai Turin à découvrir ! Il semble faire plus froid que la veille, le soleil n’est pas au rendez-vous ce matin.
Un café lungo (et même deux) accompagné de croissants (sans gluten – il serait pas un peu « bobo » ce quartier San Donato ?) fourrés à la confiture, au coin de la rue, chez Dolcelia et me voilà prêt ! Le quartier regorge de très beaux bâtiments, immeubles art Déco et « folies » du XIXeme se mêlant à des constructions plus récentes – que je remarque à peine. Sur le Corso Francia, la maison La Fleur : une splendeur.
De là je suis assez vite dans le centre historique : Piazza Statuto, via Garibaldi – grande artère commerçante et piétonne – et la Piazza Castello où sont concentrés le Palais Royal, le duomo (la cathédrale) et plusieurs palais dont le Palazzo Madama, ancienne porte romaine transformée en château au XVeme siècle et remanié aux XVIIeme et XVIIIeme siècle. Étrange résultat : blanc et ouvragé d’un côté, marron et fortifié de l’autre… La cathédrale est elle aussi étonnante : rien ne la distingue du Palazzo Reale voisin, seule la coupole indique qu’il y là une église. À l’intérieur : une chapelle, une statue de la vierge et un immense chandelier électrifié. Une jeune femme rousse s’agenouille pour vénérer la madone. La voyant seule, je la prends en photo en douce. Alors que je vérifie ma photo volée j’entends un grand fracas : la jeune femme priait avec tant de ferveur qu’elle en a fait tomber le chandelier géant. Je sort de l’église en riant comme une baleine.
Dans la cour du Palais Royal des sculptures de buffles, dans le jardin, d’ours, et d’autres abstraites et monumentales. Il n’y a pas grand monde, c’est bien agréable, le froid sans doute…
Plus bas vers le fleuve, l’ancienne cavalerie royale (d’après ce que je comprends) aujourd’hui à l’abandon et squattée par des artistes, puis le symbole de Turin : le Mole Antonelliana. Sorte de stupa qui a longtemps été la tour en pierre la plus haute d’Europe. Elle abrite aujourd’hui le musée du cinéma et propose une exposition dédiée à Gus Van Sant.
Pause lasagne dans un petit bar puis reprise de la balade le long du Pô. Encore moins de monde que dans le centre. L’église Gran Madre di Dio, des terrains de tennis, un club de kayakistes. Suivant les conseils de mon guide je me rends dans le Borgo Novo, quartier neuf du XVIIIeme siècle, où se sont établies des galeries d’art et de design. C’est effectivement assez joli mais comme nous sommes dimanche tout est fermé. Pas de pot !
Un marché au parasols jaunes, le Palais Victor Emmanuel II, un espresso au Sfachion Café – l’accueil est limite sympathique mais la deco avec de fausse affiches de cirque ventant notamment la « trancheuse humaine – 1000 tranche de sifflard à la minute » vaut le coup d’œil, une galerie commerçante avec une magnifique verrière et me voilà revenu Place du Palais Royal. Voilà des heures que je marche dans le froid, je me poserais bien un peu à l’appartement : un taxi ? Je n’en vois aucun; un bus ? Les panneaux me demeurent complètement incompréhensible, comme à Rome… Le métro ? Aucune station sur ma route. Il ne me reste que ma patience et mon énergie pour remonter tranquillement jusqu’à San Donato. J’arrive congelé après 7h de marche dans Turin. Personne à l’appartement, pas de chauffage non plus (j’apprendrai plus tard que, comme à Paris, le chauffage collectif n’est mis en route qu’à partir du 15 octobre – nous sommes le 9 !).
Je retourne dîner au Dolcelia, qui le soir devient le Queendici. En voilà un concept intéressant : pâtisserie-café le matin, restaurant-pizzeria le soir. L’endroit est sympa, l’accueil chaleureux et les pizza bien bonnes… et j’ai la chance d’être entre deux tables de garnements hurleurs… au moins je suis sur d’être en Italie.