Fin juin 2014 je m’envole avec mes parents pour un road-trip entre San Francisco et Las Vegas à la découverte des paysages des westerns de leur enfance. Ce voyage organisé pour leur soixante-dixième anniversaire nous devions le faire à quatre. En mars on trouve un crabe dans le poumon de Jean-Jacques. La chimio, la radio, l’EPO. Jusqu’à la dernière minute j’ai cru que nous pourrions partir avec lui.

Excepté un week-end à Londres dix ans plus tôt, je n’étais jamais parti en voyage itinérant avec mes parents. Il n’y en aura pas d’autres malheureusement. Un voyage terriblement merveilleux. La journée je découvre des paysages extraordinaires, guide mes parents dans une culture américaine que je connais à peine, dans des lieux que je n’ai jamais vus, j’engrange des souvenirs par centaines. Je suis heureux. La nuit j’espère des nouvelles de Jean-Jacques qui viennent parfois au petit matin. Je suis terriblement angoissé et triste.

Jean-Jacques décède le 3 novembre. La terre rouge de l’Arizona me laisse un goût âcre dans la bouche. Si je n’étais pas parti, l’issue aurait-elle été différente ? Nul ne peut le dire et, très sincèrement, je ne pense pas. Ce voyage aura été éreintant mais il reste l’un des plus beaux.

Maman a pris cette photo de moi à Antelope Canyon après que j’eus tenté de l’assassiner par déshydratation en lui faisant parcourir, à pied, sous un soleil de plomb, un petit kilomètre jusqu’au Horseband Shoe. Comme quoi elle n’est pas rancunière !…