A Ibiza chaque journée a sa plage. Et il y a une plage pour tous les jours de l’été. Nous avons mis le cap à l’ouest. Nous avons cheminé à travers la campagne, évitant la route principale, les trois scooters en file indienne. Le vent sur le visage donne un sentiment de liberté. L’air est chaud. La terre est rouge. La nature dégage de douces senteurs.
Sur la route de Santa Agnès de Corona, nous tournons à gauche vers la mer. La route devient vite un chemin caillouteux. Nous descendons vers le bout du monde. Un virage sec, et le chemin s’arrête. Nous continuons à pied sous un soleil de plomb. Nous surprenons la mer du haut de la falaise. Elle est d’un bleu profond. Le sentier est blanc et poussiéreux. La beauté du lieu nous fige un instant. Prudemment nous descendons vers la crique.
La plage est faite de grands plateaux de pierres noires. Une falaise de marne blonde, telle une pâte feuilletée, la surplombe. Le passé volcanique de l’île s’impose à nous. On se pose dans ce tableau géologique.
L‘eau est claire et fraîche. Le soleil est très chaud. La pierre nous renvoie sa chaleur. Nous ne pourrons nous allonger. Qu’importe, la beauté du lieu nous fascine.
Et là, magie d’Ibiza, un panneau annonce : Mojitos, boissons, sandwichs. Un homme s’est installé dans un creux de la falaise et vit là, tel un troglodyte. Il fait commerce à sa façon. A notre faim, il proposera du pain, du pâté, des tomates. Il étanchera notre soif avec de l’eau et du coca. Il vend des plantes. Il soigne un baigneur avec un cataplasme. Il semble sorti d’une autre dimension. Il sourit, il est heureux.
Je pense à mon métier, aux boîtes de conserves alignées sur l’étagère, à la petite banderole qui annonce la promotion, à l’étiquette du prix qui n’est pas de la bonne couleur, à toute cette énergie pour des choses inutiles. L’essentiel est ailleurs et certainement là, simplement.
Un jour, nous sommes allés à Punta Galera, et ce jour là, nous avons été particulièrement heureux.
Texte Pierre Coumes